UN rights chief expresses serious concerns over EU-Turkey agreement

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GENEVA (28 March 2016) – The UN High Commissioner for Human Rights Zeid Ra’ad Al Hussein on Thursday expressed serious concerns about the recent agreement between the European Union and Turkey, pointing to what he termed “a contradiction at  the heart of the agreement,” as well as raising concerns regarding  arbitrary detention of refugees and migrants.


“The declared aim to return all refugees and migrants contrasts with the assurances about individual assessments,» the High Commissioner said. «If the safeguards are to be considered real, then the individual assessments must allow for the possibility that the persons in question will not in fact be returned. Otherwise it could still qualify as a collective expulsion.»

The EU-Turkey agreement calls for cases to be processed under the EU’s Asylum Procedures Directive, and goes on to state that “Migrants not applying for asylum or whose application has been found unfounded or inadmissible in accordance with the said directive will be returned to Turkey.”

Zeid expressed concern that this language presents a real risk of overlooking human rights law obligations, which require States to examine arguments against return beyond those found in refugee law. Such needs could arise, for example, in the case of children; victims of violence, rape, trauma and torture; individuals with specific sexual orientation; persons with disabilities; and a range of others with legitimate individual protection needs.

The UN Human Rights Chief urged Greece to handle all individual cases with genuine attention to all protection grounds required under international human rights law, including at the appeals stage.

Zeid said he has particular concerns about returns being carried out on the basis of asylum claims in Greece being found ‘inadmissible’ because Turkey is a ‘safe third country’ or a ‘first country of asylum.’

“Even if Turkey does expand its refugee definition to include non-Europeans, or passes laws qualifying certain nationalities for ‘temporary protection,’ it may not be considered fully safe for all returns in the near future. Refugee and migrant protection systems are not simply words on paper, but require trained personnel, tailored policies, infrastructure and other concrete practical measures that take time to establish,” the High Commissioner said. “Disturbingly, there have also been recent reports of forcible returns amounting to refoulement from Turkey.”


The UN human rights chief backed the strong concerns expressed on Tuesday by other UN agencies, UNHCR and UNICEF, at the use of detention for all new arrivals in the Greek islands, including children and other vulnerable persons, adding that this appears to contravene a range of international and EU human rights laws and standards, including that immigration detention should be a measure of last resort, and the principle of “best interests of the child.” The UN Committee on the Rights of the Child has emphasized that children should never be detained on the basis of their migration status or that of their parents.

The High Commissioner expressed his concern that all returns must be carried out in full respect of the human rights and dignity of each individual being returned, including through ensuring that any consent for voluntary return is given free of any coercion and that those who are forcibly returned are protected against disproportionate use of force and other abuse of their rights and dignity.

Finally, the High Commissioner regretted that the envisaged so-called ‘one-for-one’ scheme for resettlement is to take place “within the framework of the existing commitments” to resettlement or relocation – without creating new commitments to legal pathways. He urged the EU to implement practical recommendations made by UN and other international organizations and experts concerning the creation of other regular channels for entry, including family reunification, other humanitarian pathways, and regulated labour migration in response to real labour market needs.


“This crisis is manageable if the EU acts on the basis of its own well-established and greatly respected laws and principles, and invests seriously in addressing root causes and supporting comprehensive solutions on the basis of international human rights treaties they have ratified,” Zeid said. “However, if the EU starts to circumvent international law, there could be a deeply problematic knock-on effect in other parts of the world.”




Le Haut-Commissaire très préoccupé par l’accord entre l’Union européenne et la Turquie

GENEVE (28 mars 2016) – Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Zeid Ra’ad Al Hussein s’est dit, ce jeudi, profondément préoccupé par le récent accord signé entre l’Union européenne et la Turquie, soulignant ce qu’il a appelé « une contradiction au cœur même de l’accord », et a soulevé des inquiétudes concernant les mesures de détention arbitraires des réfugiés et des migrants.

« L’intention déclarée de renvoyer tous les réfugiés et migrants contraste avec les garanties d’évaluations individuelles », a déclaré le Haut-Commissaire. « Pour pouvoir considérer ces garanties comme authentiques, l’évaluation individuelle des demandes doit prendre en compte la possibilité que les personnes en question ne soient, dans les faits, pas renvoyées. Sans cela, ces mesures seraient encore qualifiées d’expulsion collective. »

L’accord entre l’Union européenne et la Turquie demande à ce que les recours soient traités sur le fondement des directives relatives aux procédures européennes en matière d’asile, et poursuit en affirmant que «les migrants qui n’ont pas déposé de demande d’asile ou dont la demande a été jugée non fondée ou irrecevable, seront renvoyés vers la Turquie, conformément à ladite directive. »

Zeid Ra’ad Al Hussein  a dit craindre que cette formulation présente un risque réel de négligence des obligations liées au respect des droits de l’homme, qui requièrent des États l’analyse de tous les arguments contre le retour des personnes, au-delà de ceux issus du droit des réfugiés. De telles analyses sont requises notamment dans le cas d’enfants, de victimes de violence, de viols, de traumatismes ou de torture, d’individus ayant des orientations sexuelles spécifiques, de personnes handicapées et de toute autre personne ayant des besoins légitimes de protection individuelle.

Le Haut-Commissaire a exhorté la Grèce à instruire toutes les demandes individuelles avec une attention particulière aux motifs de protection, en vertu du droit international des droits de l’homme,  y compris au stade de recours contre les décisions prises.

Zeid Ra’ad Al Hussein a dit avoir des préoccupations toutes particulières vis-à-vis des retours généralisés décidés au motif que toutes les demandes d’asile en Grèce seraient jugées inadmissibles car la Turquie est un « pays sûr », ou un «premier pays d’asile. »

« Même si la Turquie élargit sa définition du réfugié pour inclure des non-européens, ou adopte des lois offrant à certaines nationalités une “protection temporaire”, elle ne peut, de manière évidente, pas être considérée comme entièrement sûre pour tous les retours dans un avenir proche. Les systèmes de protection des réfugiés et des migrants ne se résument pas à de simples mots sur une feuille de papier; ils nécessitent du personnel formé, des politiques sur mesure, des infrastructures et quantité d’autres mesures concrètes et pratiques qui ne peuvent pas être établies du jour au lendemain », a dit le Haut-Commissaire. « Plus troublant encore, des informations relatives à des retours forcés, assimilés à des cas de refoulement de la Turquie ont été rapportés».
 
Le Haut-Commissaire a dit rejoindre les fortes préoccupations exprimées mardi par d’autres agences  des Nations Unies, notamment le HCR et l’UNICEF, concernant la détention de tous les nouveaux arrivants sur les îles grecques, y compris les enfants et autres personnes vulnérables, ajoutant que ces mesures semblent contrevenir aux lois et standards internationaux et européens en matière de droits de l’homme, y compris au principe de « l’intérêt supérieur de l’enfant ». Le Comité des droits de l’enfant a exigé l’interdiction absolue de leur détention au regard de leur statut migratoire ou de celui de leurs parents.

Le Haut-Commissaire a exprimé sa préoccupation que tous les retours soient menés dans le plein respect des droits de l’homme et de la dignité de chaque individu, tout en veillant à ce que le consentement donné dans le cadre d’un retour volontaire soit libre de toute contrainte et que toute personne visé par un retour forcé soit protégée contre tout usage disproportionné de la force et tout autre abus à l’encontre de ses droits et de sa dignité.

Enfin, le Haut-Commissaire a regretté que le soi-disant schéma «un pour un » envisagé pour la réinstallation des personnes ait lieu «dans le cadre des engagements existants» de réinstallation et de relocalisation – sans créer de nouvelles responsabilités légales. Il a exhorté l’UE à mettre en œuvre les recommandations concrètes formulées par l’ONU et les autres organisations et experts internationaux concernant la création d’autres canaux réguliers d’entrée,  dont la réunification familiale, la mise en place de voies humanitaires ou la migration régulée de travail pour répondre aux besoins réels du marché du travail.

« La crise est gérable si l’UE agit en vertu de ses propres lois et principes bien établis et scrupuleusement respectés, et si elle investit sérieusement dans la lutte contre les causes profondes, en soutenant des solutions globales respectueuses des traités internationaux des droits de l’homme que les Etats membres ont ratifiés, » a dit Zeid Ra’ad Al Hussein. « Cependant, si l’UE commence à contourner le droit international, il pourrait y avoir un effet secondaire particulièrement problématique sur d’autres parties du monde.»